Psychanalyse... |
Homo economicus, Pulsions et passions du sujet contemporain
" Que nous arrive-t-il aujourd'hui dans nos sociétés avancées ? " Toutes sortes de changements affectent la technologie, le droit, la médecine, l'éducation, la culture, l'économie, la vie sexuelle et nous sommes portés à en juger les effets fort peu satisfaisants... L'économie psychique en est-elle aussi affectée... est-elle menacée ou la cause de la menace ? Quel est le nouveau "travail de civilisation" auquel le sujet contemporain doit s'employer ? La psychanalyse est-elle capable de contribuer à rpondre à cette question ? |
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Déconstruire le
Symbolique ?
Le fait symbolique, est
repérable dès les premières productions culturelles de l’Homme.
On trouve sa trace dans l’érection des monuments les plus
somptueux comme dans les manifestations plus humbles que sont
les fabrications de stèles, tertres, tumulus, tombeaux, gravures
murales, premières écritures, etc…
L’ethnographie des sociétés traditionnelles a par ailleurs montré qu’un « ordre » symbolique réglait, dans le cadre des liens de parenté, la circulation des biens, des animaux, et tout aussi bien des femmes. Il s’agit d’un ordre contraignant dans sa forme, inconscient dans sa structure, qui prescrit l’échange des dons, les pactes d’alliance, les sacrifices, les rituels religieux, les prohibitions et les tabous. L’anthropologie structurale a relevé le caractère universel d’un pur formalisme logique à l’œuvre dans les différents types d’échange qui constituent le lien social. Lacan trouve dans l’Anthropologie structurale de Claude Lévi-Strauss les fondements de sa pensée à cet égard : « Il (l’inconscient) se réduit à un terme par lequel nous désignons une fonction : la fonction symbolique, spécifiquement humaine, sans doute, mais qui, chez tous les hommes, s’exerce selon les mêmes lois ; qui se ramène en fait à l’ensemble de ces lois. […] Que le mythe soit recréé par le sujet ou emprunté à la tradition, il ne tire de ses sources, individuelles ou collectives (entre lesquelles se produisent constamment des interpénétrations et des échanges) que le matériel d’images qu’il met en œuvre ; mais la structure reste la même, et c’est par elle que la fonction symbolique s’accomplit ». L’ordre symbolique, en tant que structure, est donc à distinguer du symbolisme qui concerne le lien entre les symboles et les objets déterminés qu’ils désignent. Le symbole peut entrer dans le registre du symbolique dès lors qu’il devient un élément parmi d’autres, régi par le jeu structural. C’est ce qui permet la distinction entre la symbolique et le Symbolique, et ce saut est dû à Jacques Lacan. .../...
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Bribes
pour
une anthropologie psychanalytique
La
psychanalyse
a pour objet et moyen de son action la parole singulière de
l’analysant émergeant grâce à la règle fondamentale de
l’association libre et de son pendant : l’attention
flottante de l’analyste. Impliquer la psychanalyse dans une
appréhension globale de l’humain, –
en somme : essentialiste – c’est prendre le risque de
collaborer à l’idéologie commune et dominante, fût-ce – comme
dit Lacan dans Télévision – « au titre d’y
protester ». D’une
manière
quelque peu provocante, on peut affirmer que pour exister
la psychanalyse doit récuser a priori toute référence à
L’Humain. Elle doit refuser de limiter son écoute sous la
contrainte d’idéaux – dits universels ou naturels – opposables à
la parole de « chaque un » et de normaliser la parole. Cependant, on ne peut manquer de constater que cette position implique aussi ce qui la subvertit. La psychanalyse suppose, en effet, qu’il existe pour le sujet affecté du langage – le parlêtre – la possibilité d’un « bien dire » quant à ce qui le contraint. La cure a pour but de permettre cette énonciation. Les cures singulières participent, par ailleurs, à la construction d’un savoir à la disposition de tout sujet : la théorie psychanalytique qui fait effet dans la civilisation. lire l'intégralité de l'article |
Faut-il brûler la psychanalyse ?
Voilà le titre de la couverture du Nouvel Observateur paru le 19 avril 2012. Sur le site Internet de l'hebdomadaire, s'affichait ce même jour un dessin représentant une sorte de bûcher de divans entassés. Le 20, il avait disparu. Reste l'image de Freud au point de mire d'une cible de tir. Ce titre s'entend moins
comme une interrogation que comme une injonction de la part
d'un hebdomadaire qui, avec Sciences et avenir - du même
groupe éditorial - mène une campagne constante et virulente
contre la psychanalyse.
Faut-il rappeler que
Régine, Esther, Marie et Pauline, les sœurs de Freud sont
mortes à Auschwitz, Theresienstadt et Treblinka ? Faut-il
rappeler que la Shoah par balles s'est faite sur des hommes,
des femmes et des enfants transformés en cibles de tir ? |
Le sujet interdit… Il y a peu (20 janvier 2012), Daniel Fasquelle, député UMP, vient de déposer " une proposition de loi visant à faire interdire les pratiques psychanalytiques(1) dans la prise en charge de l'autisme(2) et à généraliser les pratiques éducatives et comportementales ". Agrégé de droit, spécialiste de droit européen, on voit bien qu'il est sans conteste, expert en matière de soins psychiatriques et d'éducation spécialisée. Il est vrai qu'il ne le prétend pas, mais il se fait néanmoins le porte-parole de certaines familles - et non pas " des familles ", comme il le laisse entendre - farouchement opposées à la psychanalyse dans le traitement de leurs enfants autistes. Dans le même temps la Haute Autorité de Santé rend un avis où il est dit que puisque la psychanalyse n'est pas une méthode faisant l'objet d'un consensus, elle n'est plus recommandée dans le traitement des autistes. Toutes affaires cessantes, le 10 mars 2012 au lendemain de cet avis, sur le site nouvelsobs.com, Laurent Joffrin se fend d'un éditorial(3) au ton triomphaliste : " Traitement de l'autisme : Une nouvelle défaite pour la psychanalyse " qui " s'affaiblit sous les coups d'une conception plus scientifique du psychisme humain ". Cette mise en cause de la psychanalyse venant d'horizons si divers ne peut manquer d'appeler quelques questions dont la moindre n'est pas de rechercher ce qui peut réunir un député de droite qui donne dans la compassion populiste, une Autorité pseudo-scientifique dont les relations avec les industries pharmaceutiques continuent d'être toujours aussi peu transparentes et un homme de presse qui se prétend plus ou moins occasionnellement et confusément de " gauche ". Essayons d'émettre quelques hypothèses. 1 - Compassion et " droit " des familles. Comment ne pas, tout à la fois, reconnaître que les familles dont le député Fasquelle se prétend le porte parole souffrent cruellement, et cependant affirmer que cela ne leur donne pas pour autant le droit de faite interdire un élément de la prise en charge qui peut être proposée au bénéfice de bien d'autres enfants et familles qui n'épousent pas leurs préjugés militants. C'est la bonne vieille technique de la suspension du jugement par l'émotion en vogue dans les émissions de télévision où tout un chacun vient montrer ses " particularités " souffreteuses et revendiquer des " droits " inhérents à cette condition. Être parent d'une enfant autiste - mais ne faudrait-il pas dire " d'un enfant affecté d'un autisme " ? - donnerait le " droit de savoir " en quoi consiste le traitement qui lui est utile et d'en exiger l'application pour lui et tous les autres. Les parents ont leurs convictions dira-t-on et " c'est bien leur droit !" De fait, certaines sectes et religions - convictions intimes - revendiquent, elles-aussi, le droit d'interdire certains types de soins dont leurs enfants peuvent avoir besoin, comme par exemple les transfusions sanguines. La loi de la République ne leur accorde pas ce droit et il y a lieu de parier que les opposants à la psychanalyse trouvent cela tout à fait normal. Pourtant, ces sectateurs sont moins hégémoniques que les familles que le député soutient : au moins n'entendent-ils pas faire de cette revendication une loi générale et ne l'imposent qu'à leurs coreligionnaires. Ainsi, on voit qu'il y a de bonnes et de mauvaises convictions selon des critères qui ne doivent rien à la raison. 2 - La science ! Mais, nous dit-on, il n'est pas question de conviction, mais de science. Et la psychanalyse n'est pas scientifique, ça n'est pas sérieux. Ça, c'est à la Haute Autorité de Santé (HAS) qui a mission de le dire. Voyons donc ce qu'elle écrit dans son rapport de mars 2012(4). Dans un rapport de plus de 50 pages, quatre lignes sont consacrées à la psychanalyse et à la psychothérapie institutionnelle - qui est inspirée, pour une grande part, par la psychanalyse. Ces quatre lignes (p. 27) disent exactement ceci : " Interventions globales non consensuelles L'absence de données sur leur efficacité et la divergence des avis exprimés ne permettent pas de conclure à la pertinence des interventions fondées sur : - les approches psychanalytiques ; - la psychothérapie institutionnelle. " A - Consensus et preuve En toute rigueur, si l'on veut bien admettre que les mots ont un sens dans un certain champ, ce qui apparaît - c'est le titre de la rubrique - c'est l'absence de consensus qui pose problème. Il faut savoir qu'à défaut de preuves scientifiques incontestables - ce qui est très souvent le cas dans les matières médicales et de soins - les recommandations de la HAS se réfèrent alors à des " avis d'experts ". Pourquoi pas ? si l'on prête attention au fait que le consensus des experts dépend de facteurs multiples qui, pour la plupart d'entre eux, ne présentent aucune garantie scientifique. Ces avis dépendent en premier lieu du choix des experts appelés à former le collège qui donnera son avis. On pourrait espérer à propos de questions portant à controverses l'exigence que l'éthique minimale est de réunir des personnes n'ayant pas a priori le même point de vue et, à tout le moins, que des représentants qualifiés des divers avis potentiels soient consultés. Le lecteur curieux jugera au vu de la liste des personnes ayant participé à ce rapport si cette exigence a été respectée. Pas un seul psychanalyste, pas une seule institution digne de représenter la psychanalyse, n'y figurent. Ces experts ne sont évidemment pas indépendants du contexte idéologique et pratique dans lequel ils interviennent. On sait qu'à propos de la psychanalyse les querelles demeurent vives dans l'espace public. C'est un sujet " d'opinion " dont tout le monde se croit autorisé à parler sans rien y connaître et bien évidemment l'ignorance des détracteurs est renforcée par le fait qu'ils n'en ont aucune expérience concrète et veillent à s'en garder. Quand on " n'aime pas " la psychanalyse, on ne fait pas de cure ! Le contexte, c'est aussi un certain ordre social où la production de soins engage des intérêts matériels non négligeables. Il n'est que de voir à la fin du rapport la liste des établissements qui ont été consultés ou participants. On ne saurait être surpris qu'ils tiennent à valoriser la spécificité de leur mode de prise en charge " efficace " afin d'entrer directement avec le service public lieu du " conservatisme " et de l'obscurantisme. D'une certaine manière on peut penser que puisque le client est roi, la garantie du succès est de satisfaire sans réticence les demandes des parents qui sont aussi les promoteurs et les gestionnaires de ces structures. En ces temps de valorisation forcenée de la consommation, celle de soins ne peut être totalement abstraite de cet idéal libéral marchand qu'on veut croire garant de productivité et d'inventivité. On voit donc que le consensuel a ses limites ! Faut-il rappeler que le géocentrisme a été durablement et assez férocement consensuel ? Faut-il faire la liste des pratiques médicales qui, elles-aussi, ont été approuvées sans réserves avant d'être abandonnées ou soumises à des usages très restreints après des applications larga manu ? Pensons aux " chocs " électriques, chimiques, à la lobotomie, à la contention systématique des agités… et des autres ! Nous pouvons évoquer, par exemple, au croisement su soin et de l'éducation, la question de l'usage de la langue des signes pour les enfants sourds. La lamentable histoire de l'interdiction de cette langue, décidée en 1880 à Milan, est riche d'enseignements. On y retrouve les mêmes ingrédients que pour la question du traitement des enfants affectés d'un autisme. Toute la communauté " scientifique ", médecins, pédagogues, rééducateurs, responsables d'établissements, était là pour décider du " bien " des autres. Les sourds devaient tous impérativement accéder à " l'oralisation " et le meilleur moyen était de… proscrire dans l'éducation des sourds la langue des signes, qualifiée au passage et entre autres gracieusetés scientifiques " d'idiome simiesque ". On juge aujourd'hui, après un siècle, que cette interdiction a eu des effets particulièrement déplorables dans l'éducation et l'accès de plusieurs milliers de jeunes sourds à l'enseignement, l'expression, la culture. B - l'argument du chaudron On connaît l'histoire de celui qui est sommé de rendre à son propriétaire le chaudron qu'il lui a emprunté et se défend avec indignation : - " Je n'ai pas emprunté ton chaudron, d'ailleurs il était percé quand je m'en suis servi. " La HAS trouve cet argument digne de sa " hauteur ". Elle nous dit que " l'absence de données sur efficacité [de la psychanalyse et de la psychothérapie institutionnelle] ", ne permet pas d'avoir d'avis… qui est à l'instant énoncé : ne pas en recommander l'usage ! Mais comme l'inconscient - auquel l'HAS ne croit pas - est efficient sans lui en demander raison, l'argument du chaudron continue son bonhomme de chemin et, malgré la gravité du sujet, non sans un effet de comique qui se lit bellement au chapitre " 6.2 Recherche clinique " : " Face au constat du faible nombre d'études scientifiques permettant de connaître les effets à long terme des interventions éducatives, comportementales et développementales mais aussi de l'absence de données concernant de nombreuses pratiques ? émergentes ou non ? réalisées en 2011 en France, il est recommandé aux équipes des centres hospitaliers universitaires et des autres organismes ayant une mission de recherche (CRA, universités, laboratoires de recherche, CREAI, etc.) de développer la recherche clinique par des études contrôlées ou par des études de cohorte. Ces études devraient prioritairement évaluer l'efficacité et la sécurité des pratiques émergentes récemment décrites (ex. méthode des 3i, etc.), des pratiques non évaluées par des études contrôlées pour lesquelles il existe une divergence des avis des experts (ex. psychothérapie institutionnelle, etc.), des interventions consensuelles, mais non évaluées par des études contrôlées (ex. thérapie d'échange et de développement, interventions débutées tardivement dans l'enfance ou mises en œuvre auprès des adolescents, etc.). Parallèlement, le suivi de cohortes devrait permettre d'éclairer les effets à long terme des interventions éducatives, comportementales et développementales. " Ainsi donc, ce qui est préconisé - les méthodes comportementales diverses - au nom d'un savoir incertain ou d'un consensus douteux est soudain pour le moins sujet à interrogations par le fait " du faible nombre d'études scientifiques permettant de connaître les effets à long terme des interventions éducatives, comportementales et développementales ". Plus étonnant encore en termes de pertinence intellectuelle " des pratiques non évaluées par des études contrôlées pour lesquelles il existe une divergence des avis des experts (ex. psychothérapie institutionnelle, etc(5).) ", devraient être évaluées. Certes, mais où et quand puisque leur usage n'est pas recommandé ? Sans rire, la HAS recommande d'évaluer des techniques dont elle recommande de ne pas se servir ! On aimerait que cette Autorité qui règne sur l'ensemble des " bonnes pratiques " et l'évaluation des médicaments dont nous usons acquière assez vite un peu plus de solidité épistémologique, ce serait rassurant. C - L'espace d'un doute Tout de même, nos experts, ne peuvent être exempts de doute. Ce qui, ipso facto, émousse quelque peu leur expertise, mais au moins leur rend un peu de l'humanité jusqu'alors absente en leurs propos. En effet, tout en se fortifiant de certitudes scientifiques aux noms le plus souvent américains(6), quelques lézardes apparaissent dans les convictions. " Les interventions développementales sont basées sur l'utilisation des intérêts et des motivations naturelles de l'enfant pour rétablir le développement de la communication avec et en relation avec les autres. Le contexte d'apprentissage est très important et les activités et les événements sont choisis pour leur intérêt pour l'enfant. L'apprentissage utilise une variété de situations et de rituels sociaux. Par ailleurs, des publications récentes faisant référence aux techniques comportementales ABA recommandent d'être attentif aux signaux donnés par l'enfant, d'y être réceptif et réactif et de partir dans la mesure du possible des activités, désirs et intentions de l'enfant lui-même, plutôt que de systématiquement imposer l'apprentissage d'un comportement décidé a priori sans observation préalable de la personnalité de l'enfant ou sans chercher à saisir les occasions de coopération ou de coordination avec lui. " (pp. 48, 49) On voit que la certitude des " motivations naturelles " - car nous sommes ici dans le registre des modulations de la matière vivante humaine ou non, le comportementalisme ne fait pas la distinction par principe - doivent cependant quelque peu composer avec cette chose redoutable et honnie : l'incertitude des situations et rituels sociaux qui, bien certainement, n'ont pas cette belle simplicité naturelle des " motivations ". L'affaire empire encore car voilà qu'il est question de " désirs et intentions de l'enfant " avec qui il est préconisé de " coopérer ". Sans doute le psychisme de l'enfant autiste est-il si transparent que tout cela se déchiffre par la simple observation. Enfin, nous trouvons au détour de la page 48 de ce rapport la seule phrase - soulignée par nous - qui présente un véritable intérêt parce que, peut-être, elle ruine toute l'assise de ce credo scientiste et que les rédacteurs n'ont pas pu en censurer l'émergence : " Les interventions comportementales trouvent leur origine dans l'application systématique des interventions fondées sur les principes de la théorie de l'apprentissage, c'est-à-dire de la méthode d'analyse appliquée du comportement, connue sous le sigle ABA (Applied Behavior Analysis). Elles consistent à analyser les comportements pour comprendre les lois par lesquelles l'environnement les influence, puis à développer des stratégies pour les changer. Les matériaux pédagogiques sont choisis par l'adulte qui prend l'initiative des interactions pendant les séances. Les renforcements sont extrinsèques aux tâches enseignées (renforcement positif) et présélectionnés par l'adulte. Des recherches complémentaires seraient utiles sur les motivations intrinsèques. " Ainsi donc, il y aurait un espace psychique à - si l'on ose dire - l'intérieur des autistes ! Mais que la psychanalyse ne s'en soucie jamais ! 3 - L'idéologie scientiste au service du libéralisme le pus dur. S'il était question, vraiment, de l'intérêt des autistes, l'interdiction de la psychanalyse ne serait pas l'objet de la proposition de loi et de l'avis si peu consistant de la HAS qui révèle une méconnaissance à peu près totale de ce qu'est la psychanalyse théoriqueme et appliquée à la prise en charge des enfants affectés d'un autisme. Aujourd'hui, on ne rencontre plus de psychanalystes qui prétendent guérir l'autisme en usant de la méthode utilisée avec les patients névrosés. Par contre, ces praticiens participent à la prise en charge multidisciplinaire dans les institutions qui accueillent les personnes affectées d'autisme. Ils accompagnent par des moyens variés - entretiens individuels, groupes de paroles, ateliers d'expression, rencontres avec les parents - les personnes prises en charge, les professionnels et l'entourage. Ils ne récusent nullement ce qui dans l'éducation spécialisée rend possible une communication apaisée, avec un minimum d'angoisse et d'agressivité et on peut les voir éventuellement mettre la main à la pâte… à l'atelier cuisine ou peinture. Ils ne revendiquent pas d'être prédominants dans la prise en charge. De même, ils ont abandonné toute idée de travailler sur " la " cause de l'autisme, mais ne cèdent pas sur cela qui est essentiel : une personne affectée d'autisme, n'est pas réductible à l'autisme et, tout autant qu'une autre, peut avoir à signifier - par ses moyens propres - ce qui la concerne dans ce qui lui advient. En somme, les analystes en institutions appliquent déjà… les préconisations de la HAS ! On peut même assurer sans crainte qu'ils ont été assez souvent les promoteurs de l'écoute des parents, des créations d'instances pour que les équipes élaborent les difficultés rencontrées dans les prises en charge et sécurisent les différents professionnels - car travailler avec des enfants affectés d'autisme engendre des mises en cause personnelles souvent rudes. Il n'y a guère que l'hypothèse du sujet qui leur est reprochée avec violence. Pourquoi est-ce si important qu'il n'y ait pas de sujet ? Voilà une question que les adversaires de la psychanalyse devraient se poser. Mais ils s'en défendent. Au lieu de sujet, ils veulent de la mécanique réflexologique, de la " nature ", de la " réponse aux besoins ". Interdire à la psychanalyse de participer à la prise en charge autistes, c'est refuser cette complication : les autistes ont une subjectivité. Le retrait, " l'inquiétante étrangeté ", la détresse d'une souffrance souvent incompréhensible n'existent que parce que ces " autres " sont des humains. C'est précisément ce que les pratiques comportementales ne veulent pas accepter. Elles séduisent alors ceux à qui elles s'offrent comme le paradigme de la naturalisation pavlovienne des rapports interpersonnels et sociaux. Sans doute est-ce sur ce point qu'un alinéa du chapitre " 6.2 Recherche clinique " du rapport de la HAS prend tout son sens : " Les critères de jugement principaux de l'efficacité [des traitements] devraient correspondre à des variables considérées comme essentielles pour l'amélioration de la participation de l'enfant/adolescent au sein de la société, tant du point de vue des professionnels que des associations représentant les usagers. " S'agit-il d'objectifs guidés par le souci d'autrui dans une démarche de soins, d'éducation ou de ceux qui gouvernent le " management " de Renault, France Télécom ou du groupe La Poste et quelques autres avec les succès humains que l'on sait. Obtenir le traitement de l'autisme sans psychanalyse apparaît alors comme " la tête de pont " d'où peuvent être investis les champs de la santé mentale, de la santé physique, de l'éducation, du management, de la propagande politique. " Généraliser les pratiques éducatives et comportementales ", c'est espérer pouvoir conduire tous les hommes par des méthodes " scientifiques " vers des buts qu'on leur désigne comme enviables ou nécessaires, mais dont ils ignorent à peu près tout et à propos desquels, seule la soumission à l'objectif est requise. Monsieur Joffrin aurait dû penser à cela - mais il aurait fallu qu'il se documente quelque peu ! - avant de se lancer dans sa diatribe. L'homme de gauche qu'il prétend être aurait dû prendre garde de ne pas s'allier à ce que la droite libérale et marchande ambitionne d'installer de plus radicalement aliénant. C'est toute une anthropologie qui est ici menacée et les personnes affectées d'autisme sont là, cyniquement, prises en otages au service d'une idéologie déshumanisante qui se masque de gros bon sens, de bons sentiments et de pseudo science. G. Herlédan (2) Encore un singulier bien singulier. L'autisme... est-on si assuré qu'il soit Un, à tout le moins on peut constater que les personnes affectées d'autisme, le vivent de manières si différentes que la réduction paraît ici bien peu établie en clinique du cas par cas, du un par un. Mais certes, c'est - dans cette proposition de loi - ce à quoi on ne veut penser à aucun prix ! (3) http://tempsreel.nouvelobs.com/laurent-joffrin/20120310.OBS3461/traitement-de-l-autisme-une-nouvelle-defaite-de-la-psychanalyse.html (4) http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_953959/ autisme-et-autres-troubles-envahissants-du-developpement-interventions-educatives-et-therapeutiques-coordonnees-chez-lenfant-et-ladolescent |
Vers une généralisation de la théorie lacanienne des
discours ?
Par Alain Cochet et Gilles
Herlédan La psychanalyse est une
clinique au singulier. Cependant, depuis les premiers textes
freudiens, elle produit un savoir double : celui de
l'inconscient qu'elle fait émerger et qu'elle met au travail ;
celui d'un corpus d' " allure " scientifique qui est
plutôt à entendre au sens de Habermas, comme usage critique et
public de la raison, et qui relève d'une approche
anthropologique. Ce deuxième savoir peut être au service des
praticiens - fonction de formation - mais s'adresse aussi très
souvent à des lecteurs curieux de la nouvelle "
science ", qu'il s'agisse de lui reconnaître des
fondements raisonnables ou de critiquer ceux-ci. Comme on peut
le constater au terme de plus de cent années de publication
par des psychanalystes ou à propos de la psychanalyse,
celle-ci est devenue aussi - et probablement de manière
permanente - un objet du savoir universitaire et de la doxa
populaire. À tel point que " La " psychanalyse est très
souvent invoquée sans plus aucune référence à la dimension de
la cure, comme un savoir parmi tant d'autres, ressortissant
des sciences humaines, voire de la philosophie. Elle est ainsi aux
prises avec l'ensemble des phénomènes sociaux. |
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Le scriptal Tout au long de sa
recherche jalonnée de publications, A. Cochet, serre au plus
près le texte lacanien. Cette rigueur porte à conséquence.
Ici, de se confronter au nécessaire dégagement de l'ordre de la Lettre. Après Freud qui
en a perçu, dans l'analyse du rêve notamment, toute
l'importance, Lacan n'a pas cessé de côtoyer cette instance de
la Lettre sans toutefois lui reconnaître un statut plénier. Le
primat du signifiant le minore constamment. G. Herlédan |
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Les folies
millénaristes Gérard Haddad, Livre de Poche Publié en France en
1990, cet ouvrage écrit entre Paris et Jérusalem de 1984 à
1989, nous invite à réfléchir à une folie bien particulière
des hommes, celle du crédit apporté aux utopies d'un monde
idéal : Âge d'or, fin de l'Histoire et messianismes divers. À
travers l'histoire, elles n'ont pas cessé de faire couler des
flots de sang et le XXe siècle en a réalisé les plus
sinistrement " parfaites " expressions : nazisme et
stalinisme. Gilles Herlédan |
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En réponse aux imprécations de Michel Onfray... les versions intégrales de
quatre articles publiés, sous forme légèrement abrégée, par la
revue Golias |
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L'Église sur le divan, Daniel Duigou, Bayard L'auteur de cet ouvrage
a été journaliste, psychanalyste et prêtre. Aujourd'hui,
toujours prêtre, il vit retiré dans une vallée du Maroc où il
accueille des "retraitants". Il ne renie rien de ces trois
"métiers" qui semblent être un peu une déclinaison des trois
dont Freud disait qu'ils étaient impossibles : gouverner,
éduquer et soigner. Daniel Duigou répond
positivement et cela ne lui fait certes pas que des amis. Ce
qu'il en déduit c'est que l'Église va mal et n'a plus les
moyens de changer car elle s'est trop identifiée à ce qui,
pour elle, fait symptôme : se complaire dans la posture d'être
la citadelle de la vérité assiégée par le monde de l'erreur,
du mensonge et de la corruption. Gilles Herlédan P.S. : On croit savoir que se prépare un nouvel ouvrage où il serait question "d'en finir avec la sacrifice"... Dans la veine de Le Sacrifice interdit de Balmary ? À suivre ! |
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Lettre ouverte à Michel
Onfray
par Gérard Haddad Publiée dans Le Monde 10 mai 2010 Cher Michel Onfray, J'ignore si mon nom vous dit quelque chose, et sans doute ne m'avez-vous jamais lu. J'ai par contre, il y a quelque temps, lu,
avec sympathie, un de vos livres. Vous y racontiez ce vœu de votre
père, agriculteur, de voir le pôle Nord, et ce vœu, avec un amour
filial, vous l'avez exaucé quand vos finances vous l'ont permis.
J'ai trouvé à ce souvenir, pardonnez-moi, un parfum freudien. Je
crois en effet que, dans votre étude approfondie de l'œuvre de
Freud, quelque chose d'essentiel vous a échappé. C'est que cette
œuvre est tout entière construite autour de l'amour du père, amour
premier. Je vous renvoie au chapitre 7 de son œuvre, Psychologie
des groupes. Le même Freud avait depuis longtemps énoncé cette
vérité vérifiable, que j'ai en tout cas vérifiée dans mon
existence, la mort du père est sans doute la plus grande douleur
qu'un homme peut éprouver. |
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Charlotte
Herfray, Vivre avec autrui… ou le tuer ! La force de la
haine dans les échanges humains, Érès, 2000
Pas facile de présenter
en peu de mots cet ouvrage assez bref où, chacun a sa juste
place dans l'ensemble d'un propos clair et tranchant qu'on a
trop le sentiment d'émousser. Pas de doute, il faut le lire
dans son entier et entendre le souffle vivant de l'auteur. Marie-Laure Jeanne Herlédan |
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Ce petit livre comprend
trois essais dont les deux premiers datent de 1968 (La foi à
l’épreuve de la psychanalyse) et 1972 (Aide spirituelle et
psychanalyse). Maurice Bellet s’y révèle un questionneur
méthodique qui sait définir les termes des questions qu’il
pose au-delà des pièges de la pensée convenue des deux « camps
». Exercice non point facile en ces temps déjà anciens. Gilles Herlédan |
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Le
fait
n'est pas toujours très connu, mais Lacan se réfère souvent à
de grands mystiques (essentiellement chrétiens) pour donner
des exemples à l'appui de ses théorisations. C'est en somme
une sorte de "clinique" si l'on veut bien ôter à ce terme une
connotation pathologique. Gilles Herlédan |
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Sans doute, une des qualités de ce livre tient à ce qui s’énonce dans la quatrième de couverture : « contrairement à Freud, je ne dis pas que la religion est seulement une illusion et une source de névrose ». Il y a dans la croyance un fait de culture qui n’est pas indigne d’étude pour la pensée contemporaine et ne peut être réduit à la critique de son « utilité » sociale, qu’on la juge bonne (source de l’humanisme) ou mauvaise (justification de toutes sortes de crimes). Croire, comme « incroyable besoin », nous révèle la psychanalyse, entraîne l’examen à frais nouveaux de ce qui résiste au savoir ou à la norme d’une société guidée par le discours de la science. Renvoyant parfois à des considérations théoriques que le lecteur non spécialiste de la psychanalyse peut trouver déroutantes, ce livre est aussi ancré dans la considération de faits d’actualité — évolution de la fonction paternelle, rapport des religions entre elles — ou de constantes anthropologiques — l’amour, la haine, le « souffrir », etc. Par là, cette lecture se révèle stimulante pour reconsidérer certains lieux communs de pensée dans les lesquels croyants, agnostiques ou athées, sans oublier les psychanalystes, prennent soin trop souvent, de loger leurs paresses. Gilles Herlédan |
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Avec La vie parfaite
Catherine Millot s’intéresse à trois femmes qu’on appelle
volontiers mystiques : Jeanne Guyon, Simone Weil, Etty
Hillesum. De son point de vue de psychanalyste on aurait pu
craindre que l’auteure soit trop portée à faire — trop
classiquement — une sorte de psycho(patho)logie de ces trois «
cas ». Une autre approche aurait été possible et C. Millot
l’évoque : « longtemps, j’ai cru que c’était leur jouissance
qui m’attirait ». Gilles Herlédan |
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Le « Discours aux
catholiques » est la transcription d’une intervention de Lacan
en 1960 invité à Bruxelles par la Faculté universitaire
Saint-Louis. Quatorze années plus tard, c’est à Rome qu’il est
interrogé par des journalistes au Centre culturel français. Gilles Herlédan |
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Difficile d'imaginer un
texte aussi dense et précis. En moins de 100 pages Philippe
Julien ne s'attarde pas en des débats convenus et ne vise
aucun consensus. Il cherche et trouve — selon nous — de la
manière la plus juste ce qui rend le titre de son ouvrage
judicieux. Psychanalyse et religieux traitent pas des voies
différentes d'une même question. Pour découvrir laquelle, il
lui faut faire œuvre d'historien — si ce n'est de géographe —
en déployant le paysage intellectuel où Freud, Jung et Lacan
ont situé la question du rapport de la psychanalyse au
religieux. Gilles Herlédan |
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Une relecture de cet ouvrage qui est à
l’origine la thèse de M. Gérard Haddad laisse l’intérêt
intact. Marie-Laure Jeanne Herlédan |
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Michel de Certeau
(1925-1986), jésuite, est un historien des textes mystiques de
la Renaissance à l'âge classique qui s'est très profondément
intéressé aux méthodes de l'anthropologie, de la linguistique
et de la psychanalyse. Gilles Herlédan |
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Il y a quelques années
une grande banque française avait pour slogan : " votre argent
nous intéresse "... ça avait au moins deux mérites ! Celui de
la clarté du propos et de définir la limite de l'intérêt porté
à notre personne par le banquier. Il en voulait à nos sous...
pouvait-on en être surpris ? Pas à notre intimité. Marie-Laure Jeanne Herlédan |
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Site
réalisé par Alain Cochet et Gilles Herlédan. Des
bases et aussi des approches plus détaillées. |
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