Car
je t'aime, ô Éternité !
Gallimard,
1966
Le
dévoilement progressif d'une figure d'homme, Jérôme
Strozzi, telle est la tâche que l'auteur de Mais il y a la mer et
de Le plus petit abîme mène de bout en bout avec violence
et tendresse.
C'est d'abord à travers l'histoire d'une femme rencontrée
ou rêvée qu'apparaît l'étrange puissance de
Jérôme Strozzi. Qui est donc ce Strozzi qui laisse un jour
derrière lui trente années de vie tranquille et honorée
et dont nous suivons l'existence aventureuse à Paris en plein cur
du monde de la prostitution? Un instable, un révolté, un
homme qui a conquis sa liberté? Peut-être une espèce
de saint qui brave et renverse, sans même les apercevoir, tous les
obstacles rencontrés sur son chemin: l'incompréhension et
la méfiance des autorités, les tentations et les coups.
Du Paris de l'enfance au Collège de Thonon, de l'École Polytechnique
dont il est exclu pour indiscipline jusqu'à l'École où
il enseigne, de Suisse d'où il est expulsé jusqu'à
Paris enfin de nouveau, Jérôme Strozzi mène sa vie
de fidélité en même temps que d'indépendance
et d'amour dans une ascèse solitaire et souveraine. C'est à
Paris, à travers une amitié, qu'il découvre, dans
les quartiers misérables ou opulents, une vérité
terrible en même temps que l'approfondissement d'une vocation. La
prostitution à laquelle il se trouve affronté, presque malgré
lui pourrait bien être tout autre chose que la prostitution folklorique,
une prostitution plus universelle...
Il atteindra la vieillesse comme un hors-la-loi du sacerdoce, signe de
contradiction, infiniment protégé dans l'orgueil et l'humilité
de sa foi.
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Devance
tout adieu
Gallimard,
1966. Prix des écrivains de l'Ouest 1988, collection Folio, n°1461.
S'apercevoir que l'on a vécu une enfance; la voir refluer sur soi
avec émerveillement alors qu'on s'en était toujours défendu;
y lire en même temps une menace, un signe de mort: telle est l'expérience
que rapporte l'auteur-narrateur de Devance tout adieu. Un jour
vient après la longue absence des sentiments conventionnels, qu'il
retrouve sa mère à travers une amitié plus forte,
du moins le croit-il, que l'attachement de la chair. C'est une seconde
enfance. Mais la seconde enfance ne dure pas: il faut renoncer à
un trop proche visage de Dieu laisser là ses illusions orgueilleuses
et se retrouver devant la vérité nue. Sa mère meurt
une mort terrible qui ne ressemble en rien à sa vie d'acceptations.
Dans un hôpital-usine elle connaît la déréliction.
Sans le vouloir au fils raisonneur et stoïcien trop content de sa
foi délivrée qui n'est peut-être qu'un système
de défense l'humble femme donne l'ultime leçon: la mort
n'est pas naturelle.
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